Vous sentez cette chose qui grouille entre vos hanches, qui gratte les parois de votre intérieur pour venir se loger au creux de votre cage thoracique, puis au final arriver à se hisser le long de votre gorge pour se cacher dans l’ombre de vos dents du fond. Ça gratte, ça démange, ça a laissé un sale truc envelopper votre cœur. Les commissures des lèvres ont du mal à former un arc rayonnant, laissant juste place à une moue tordue un peu morose. Un soupire s’échappe d’entre les lèvres du sujet qui essaye de feindre le naturel, voir même l’injonction au bonheur. Mais c’est difficile, c’est un sentiment compliqué. Tout ce qu’on arrive à voir au final c’est un être vide, un peu mélancolique.

Rien n’échappe de cette carcasse blanche, elle est calme, très calme, trop calme peut-être même. Rien ne dépasse, le corps n’est que pureté dans la forme, mais dans le fond l’âme est plus complexe. La lueur est perdue dans le vaste espace que sont les ténèbres du soi, elle est égarée, un peu peureuse. Quelque chose dans l’ombre est tapie et chuchote une étrange litanie. C’est l’autre dit-on. Un machin inconnu, qu’on fuit, qu’on ne veut pas connaître. Lorsque les humeurs du sujet ne s’élèvent pas, ce truc étrange se met à lui susurrer des autres trucs étranges au creux de son crâne.
Pour chasser la créature des coins noircis, la carcasse blanche se force à être souriante, elle pousse de force, elle se meurtrit même l’intérieur pour faire taire cette voix, qui des fois devient ces voix.
Alors l’être offre un air souriant, mais jamais ne découvrant ses dents. Il est simple, à peine appuyé, il est bienveillant. Des fois on pourra peut-être entendre un léger rire, notant une légère espièglerie, et un air joueur s’en dessinera certainement au coin de ses yeux pales et de sa bouche à peine rosée. Mais jamais le corps ne manquera de sagesse, il saura toujours où tout commence et où tout s’arrête, prodiguant alors de précieux conseils s’il le faut, prouvant un profond altruisme.

L’allume mystique ne se verra en rien décevante dans son comportement, toujours polie, sauf peut-être quelques fois si sa curiosité l’emporte un peu trop, mais elle s’en excusera. Ne voulant ni provoquer le désir, ni la jalousie ou même la haine, l’être se verra préférer un comportement pacifiste et humble plutôt que belliqueux, ne voyant que comme seule arme les mots savamment arrangés pour calmer les ardeurs.

INFORMATIONS EN (+) :
▬ Nix est neutre dans les affaires politiques. Elle viendra en aide à qui lui demandera.
▬ Nix a du mal à avoir des émotions qui lui sont propres. Elle vit à travers celles des autres.

CORRECTION + UC

Il faisait sombre dans ce monde. Il a toujours fait sombre dans son monde, celui de Nix. Pour beaucoup ça aurait été angoissant, pour elle pas du tout. C’est comme ça et pas autrement, et ceci depuis toujours. Les seules choses de concrète dans son univers, sa petite bulle, c’est tous ces sons, ces bruits qui pouvaient parvenir à ses oreilles, qui parviennent toujours. Et puis aussi ces trucs aux angles différents, aux textures différentes, aux goûts différents qui pouvaient fondre contre sa langue. Ou bien encore les machins qui peuvent venir vous titiller les narines comme la fumée d’un bois qui brûle, le parfum d’une vieille dame trop riche à cet âge et qui ne se gêne pas pour le montrer. Mais ce qui a toujours fasciné Nix c’est le toucher, sentir sous la pulpe de ses doigts la chaleur, ou bien la froideur d’un corps. Elle aimait sentir le grain des pierres dures et le comparer au grain de la peau humaine. Pour elle c’était un peu pareil, sauf que l’un est froid, l’autre est chaud.
Sinon Nix faisait aussi parti d’un autre monde que le sien. Un monde un peu plus vaste, un monde où elle est née. Enfin on croit. Personne ne sait vraiment. Même pas elle. Depuis toujours cette petite a fait partie de La Troupe, un groupe d’artiste amusant les villages et les grandes villes. Elle a été recueillie par eux, une grande famille. Ou volé. On ne sait pas vraiment, c’est flou. Mais de toute façon maintenant on n’y prête plus vraiment attention, c’est du passé. Qui encore s’intéresse au passé ? Pas grand monde…Sauf Nix. Nix a toujours aimé savoir qui était les gens, à défaut de ne pas les voir. La petite elle a toujours aimé les histoires, les contes que les vieux racontaient le soir autour du feu. C’était une drôle d’ambiance. Les jeunes ne disaient rien, ils étaient sages, le contraire du reste de la journée, et il n’y avait qu’une voix un peu cassée qui s’élevait. Tout ça pour dire que Nix a toujours aimé les histoires, les trucs un peu obsolètes.

Dans La Troupe la petite a fait un peu de tout. On ne sait pas vraiment pourquoi ils ont recueilli une aveugle. Les handicapés c’est pas vraiment utile. Mais il parait que la vieille doyenne du groupe elle sentait un truc en elle. Un truc puissant. Alors c’est peut-être pour ça que la petite Nix elle est tombée dans ce regroupement de gens aux talents diverses. La seule fois où elle regrettait de ne pas posséder la vue c’est lors des représentations, quand les autres se donnaient en spectacle devant les peuples. Il parait que c’était « Beau ». Mais Nix ne sait pas vraiment ce qu’est le beau. Elle ne sait pas non plus ce que sont les couleurs. Elle, elle connait juste la sensation des plumes douces contre sa peau. Ces plumes que les danseuses passaient sous son nez pour s’amuser, essayer de faire sourire la gosse. Elle, elle ne connait que les éclats de voix qui crient des instructions, les éclats de rire, et les éclats de larmes. Elle, elle ne connait que l’odeur de la poudre à canon, cette poudre pour faire exploser des trucs. En fait Nix ne connait pas grands choses à cette époque, elle ne le connaitra jamais.

Sinon un jour y’a un gars du groupe il s’est dit qu’il faudrait lui apprendre des choses à cette gamine. Elle a une un regard bizarre, elle ne sourit pas vraiment, mais elle est pas laide, y’a un truc chez elle. Alors Nix elle s’est mise à marcher sur des fils. Au début ce n’était pas trop haut, puis après aurait presque cru qu’elle pourrait passer sa tête dans un nuage. Le truc avec elle, c’est qu’elle n’avait pas peur du vide. Normal, elle ne le voyait pas, elle ne le connaissait pas. Et puis chose folle, elle avait un équilibre défiant même les plus entrainées. Nix a toujours trouvé ça normal. Elle avait juste à sentir la corde sous ses pieds, elle avait juste à écouter d’où venait le vent pour survivre aux chutes qui pouvaient être fatales.

A part cela il n’y a pas grand-chose à dire sur la petite enfance de cette gamine qui était prise pour le petit fantôme, la gosse un peu bizarre du groupe. Les autres petits de son âge n’allaient pas vraiment vers elle, ils préféraient l’éviter, voir même lancer des rumeurs ou des jeux débiles contre elle. Mais en général ça ne durait jamais bien longtemps, les adultes régulaient les débordements, et puis de toute façon Nix n’en n’avait pas grand-chose à faire non plus. Elle semblait toujours autre part, dans un autre monde. Elle soupirait tout le temps comme pensive et elle ne parlait pas beaucoup. Sauf à la Doyenne de la Troupe. C’était la seule personne qui s’intéressait vraiment à elle, qui essayer vraiment de comprendre comment elle était, qui elle était.

En fait, avant de finir sur l’enfance de Nix nous pouvons parler d’un événement qui lui a permise de ne plus se retrouver seule.
La Doyenne était aussi un peu étrange, mais tout de même respectée. On ne savait pas d’où elle venait, pourquoi elle avait construit cette grande famille d’artiste, et probablement qu’on ne le saura jamais.
Un jour la vieille dame avait convoqué la gosse sous sa tente et lui avait parlé d’un rituel pour ne plus jamais être seule et protégée. Bien sûr Nix était intriguée et intéressée comme elle n’arrivait pas à se faire des amis au sein du groupe après tant d’années. Alors un soir la femme avait installé des cercles et des bougies. Elle avait placé la petite dans l’un d’eux puis elle lui avait demandé de se souvenir de la chose qui l’avait le plus marqué. Alors Nix s’est souvenu de ses moments où elle comparait longuement le grain des pierres avec sa peau. Elle se souvenait des sensations.
Bien vite la petite c’est retrouvé à entre un étrange sifflement juste devant elle.
Et voilà tout simplement d’où lui vient son compagnon de route qui ne la lâchera plus à partir de ce moment-ci.

Je pense que c’est à peu près tout ce que l’on peut raconter sur la petite enfance de Nix. Le reste n’a pas vraiment d’importance pour elle, elle commence à l’oublier, les événements ne sont plus si clairs que ça.

Un peu plus tard dans sa vie, lorsqu’elle était un peu plus âgée, peut-être treize ou quatorze ans, le passé n’est plus si certain, un évènement dramatique arriva au sein de la Troupe. De toute façon, les années passant, tout le monde s’attendait à ce que cela arrive. Le souffle avait du mal à faire son voyage de l’extérieur vers l’intérieur des poumons, le regard était fatigué, et la tête n’y était plus vraiment lorsque les angoisses de la vie, mais surtout des affaires, remontés. Alors que le groupe d’artistes n’était pas à son avantage financier dû à une demande moindre de l’amusement, la doyenne, la grande Mère de cette entreprise mourut, expirant un soir le reste de son âme.
Cette femme fut comme une mère pour Nix. Elle lui a appris tout ce qu’elle a pu, elle l’a protégé comme si c’était sa propre fille, la chaire de sa chaire. Mais étrangement la petite ne sembla pas si affectée que cela. Enfin, c’est ce que les autres membres de la Troupe ont constaté trop vite, en n’en voulant profondément à cette gamine qui n’avait rien demandé, et passant donc toute leur triste et leur colère sur celle-ci. Mais la réalité était toute autre. Nix n’était pas très expressive, elle avait du mal à comprendre certains concepts. Et puis elle avait la manie de s’auto-défendre en essayant d’oublier ce qui pouvait lui faire du mal, alors c’est ce qu’elle a fait durant les premiers jours, pendant les jours de deuil. Elle a fait comme si la Vieille doyenne n’était pas morte, qu’elle était toujours là, juste un peu fatiguée, donc endormis.
C’est seulement au bout du cinquième jour, lorsque la Troupe itinérante dû se déplacer vers une nouvelle ville que la petite s’est isolée et s’est mise à pleurer, rendant toutes les larmes de son corps. C’est le seul moment où ces yeux ont réussi à exprimer quelques choses, pendant ces quelques heures où elle déversa tout son chagrin. Rien n’échappa de sa gorge, elle n’entendait plus rien, ne sentait plus rien. Il n’y avait que sa peau qui ressentait, que ses joues qui laissaient glissés les larmes vers son menton, puis les gouttes finissaient leur course au creux de son cou.
Personne n’en n’a rien su. Même pas les plus curieux qui pouvait l’épier. A la place ils ont juste vu une masse brillante aux couleurs riches et à l’air tranchante. C’était Nix ayant formé une carapace de cristal. Tous ses membres étaient aussi fragiles que dangereux.

Plus le temps s’écoulait, plus la vie au sein de la Troupe était difficile. Nix n’avait plus personne, elle devait survivre comme elle pouvait. Pour seule compagnie elle se retrouvait avec son serpent auquel elle n’avait pas donné de nom. Disons qu’elle avait du mal à s’attacher à ce morceau d’elle, mais en même temps qui n’était pas vraiment elle. Elle avait du mal à comprendre. En tout cas, lui, le serpent, il ne s’en formalisait pas, protégeant comme il pouvait ce petit morceau de viande. Des fois il essayait de lui siffler quelques mots au creux de son petit crâne blanc, mais elle n’y répondait jamais, ou du moins, jamais par des mots distincts.

Un beau jour il y eu un conseil à son sujet. Elle commençait à être grande, la doyenne n’était plus là pour la protéger, la gamine ne faisait rien d’utile à la Troupe et elle commençait à sérieusement effrayer les quelques curieux qui pouvaient vouloir venir se divertir sous les tentes de la Troupe.
Dans le monde des nomades il n’y a pas beaucoup de place pour les gens comme Nix, surtout quand après tant d’années, même, toute une vie, l’intégration au groupe ne s’est pas faite et ne souhaite pas être faite, d’un côté, comme de l’autre. Alors la dure décision a été prise qu’à la prochaine ville, la jeune fille serait livrée à elle-même. Tout simplement. On pourrait trouver ça cruel, mais le verdict est tombé d’un choix commun. Au début les plus vieux voulaient essayer de trouver une famille, un orphelinat, ou quelque chose comme ça pour qu’elle puisse éviter de se retrouver à la rue et tombée dans on ne sait quoi, comme de la prostitution… Mais la gamine a osé ouvrir sa bouche pour refuser, déconcertant tout le monde, mais aussi les arrangeants bien.

C’est donc comme ça qu’un jour, alors qu’elle allait sur ses quinze ans, que Nix c’est retrouvée pour le coup complètement livrée à elle-même devant les portes d’une ville qu’elle ne connait pas et qu’elle ne peut voir.
On ne sait pas vraiment ce qui s’est passé entre les parois crâniennes de la jeune adolescente, et le serpent qui l’accompagnait avait beau être ses yeux et conscient, il ne put raisonné la demoiselle. De toute façon à cet âge-ci elle faisait comme si ce truc n’existait pas, le snobant complètement. Alors elle a tourné les talons et elle est en direction de la forêt. Lui posait la question de pourquoi un tel choix est peine perdue, elle ne répondra pas ou dans le meilleur des cas, elle restera vague.